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Journal de bord du 28 novembre au 9 décembre 2005

28.11.05 :

Plus de Mini-M (téléphone satellite), coupés du monde ! Plus de joujou pour  Nicole, plus d’appels ou de petits messages avec «  les filles » pour les « célibataires » du bord. Alain a tout démonté, tout essayé, jusqu’à chauffer la puce et la mettre au frigo. L’énergie du désespoir ! Il ne reste plus qu'à tente d’atteindre les bateaux proches de nous par VHF. Tenacious, un bateau hors ARC, nous répond rapidement et transmet par e-mail notre position et l’annonce de la panne à l’ARC. Nous demandons que l’ARC informe les familles et espérons que cela sera fait et que personne ne s’inquiétera outre mesure.

Peu de vent. Nous mettons le moteur quelques heures pour aller chercher … les alizés !

 

29.11.05 :

9h15, on hisse le spi ! Nous sommes entrés sur l’autoroute et espérons ne plus la quitter jusqu’à l’arrivée. Mais cela bouge toujours. Le vent monte, la vague se creuse, c’est un tout autre rythme auquel il faut s’habituer : ça roule d’un bord à l’autre, ça tangue !

Impossible de transmettre la position aujourd’hui : un seul bateau répond,un français qui n’a pas de moyen de communication avec la terre.

Le soir, on affale le spi pour le repas d’anniversaire de Bernard : filet de bœuf, gratin et bon vin.

 

30.11.05 :

Impossible d’atteindre un bateau depuis hier. On n’aimerait pas que nos familles s’inquiétent. D’autant qu’il n’y a vraiment pas de quoi : foie gras et Sauterne pour fêter la mi-parcours. Merci Jacques-Marie !

 

01.12.05 :

Au petit matin, un craquement sinistre nous inquiète : on affale le spi en catastrophe. La poulie en tête de mât a explosé. Après analyse et mûre réflexion, Bernard est hissé en tête de mât. Dans les vagues, il fallait du courage. Cela valait largement le grand huit. Une heure et demie plus tard, le spi peut être réhissé.

A midi, nous avons une conversation grésillante avec un Oyster 72 qui transmet notre position. A 15h, je profite d’une meilleure écoute pour lui demander de passer un mail * à Yann. Nous voici rassurés…vous aussi j’espère.

Quelle journée ! A 18h, un beau thon d’une dizaine de kilos mord à l’hameçon. A 7.5 nœuds sous spi, Pierre a eu peur pour sa canne qui se pliait à rompre. Le carpaccio sera délicieux ce soir !

 

Rubrique « on a testé pour vous » : l’e-mail par VHF – Dernier cri de la technologie.

  1. D’abord, vous cherchez un bateau proche de vous (moins de 50 km environ). En plein milieu de l’Atlantique, cela peut prendre quelques jours. Avec un peu de chance, il sera équipé pour transmettre des e-mails par satellite ou par BLU (ondes radios).
  2. Vous lui dictez l’adresse : pour une bonne précision, mieux vaut l’épeler : yankee-dot-bravo-oscar-november-juliett-oscar-uniform-romeo…scrrrr.. …scrrr …pas compris… répétez…
  3. Après 5 minutes, vous pouvez dicter votre texte. Comme il y a toutes le chances que le relais ne soit pas français, vous sortez votre meilleur anglais. Si l’interlocuteur est anglais, vous aurez la correction simultanée à l’autre bout. S’il est philippin (sur les cargos par exemple), cela risque d’être plus laborieux. Nous n’avons pas osé essayer malgré deux cargos croisés de nuit.
  4. Avec un peu de chance, le message partira dans les heures qui suivent, lors de la prochaine connexion du bateau. Pour une éventuelle réponse, pas la peine d’espérer : quand elle arrivera, le bateau relais sera déjà certainement hors de portée VHF et ne pourra pas vous la lire.

 

04.12.05 :

Les journées s’écoulent tranquillement sous le rythme de l’alizé. J’ai rangé la dernière polaire, même la nuit on barre en short et en T-shirt sous une coupole étoilée. J’ai vu la Croix du Sud hier juste avant le lever du jour.

Pendant la journée, il fait très chaud et nous nous agglutinons sous l’ombre du bimini pour manger. La jupe arrière fait office de douche ou de plage. On remplit un seau d’eau de mer et on s’asperge. Quel bien cela fait !

Hier, nous avons croisé un catamaran d’assez près. Il y pu relayer notre position. Mais aujourd’hui il ne répond plus. C’est à nouveau le grand désert.

Bernard s’est donné. Il a fait une brioche aux raisins délicieuse. Je l’ai dégustée en regardant le lever du soleil pendant que « Piguet », le pilote automatique barrait. C’était magique.

 

5.12.05 :

Depuis hier soir, c’est une temps à grains. Le premier, après minuit, était encore sec et nous a juste fait affaler le spi et prendre un ris pour le reste de la nuit. Le second, au petit matin, nous a obligés à rouler le génois et nous a trempés. Après quelques heures de soleil, c’est reparti pour la douche !

 07.12.05 :

Le vent est toujours fort et la vague nous bouscule sans répit. Hier, on a vécu en noir et blanc : mer grise, ciel bas et sombre, grains, orages…triste. Aujourd’hui, c’est la même chose mais en couleurs : mer bleu profond couverte de moutons écumants, ciel bleu et soleil ! Cela va beaucoup mieux même si chaque mouvement est difficile car il faut se tenir en permanence. Le simple fait de se laver les dents devient acrobatique et je ne vous parle pas de la cuisine ou la vaisselle. Comme nous avons pêché une magnifique dorade coryphène, il fallait bien la manger. Nous l’avons cuite au four hier soir et Pierre a préparé un petit beurre citronné. Nous avons des sets antiglisse très efficaces : les assiettes ne bougent pas sur la table. Mais le beurre citronné, lui, a suivi le mouvement naturel…et il y en avait plus sur la table que sur le poisson. On ne compte plus le nombre de choses qui voltigent ainsi dans le carré : le thé, le ferment préparé pour les yoghourts, le lait… et on ne compte plus les jurons qui vont avec.

Cela devient même difficile de barrer car la vague est grosse et les risées montent à 30 nœuds. Nous laissons faire « Piguet », même s’il fait quelques embardées : tout est bien calé dans le bateau et on s’habitue au vacarme de tout ce qui bouge dans les armoires.

Nous commençons le décompte des heures avant l’arrivée : une trentaine. Qu’est-ce que cela fera du bien d’être à plat !

08.12.05 :

J'ai parlé trop vite ! "Piguet" est mort ! Nous avons peut-être un peu abusé de ses services et il a rendu l'âme cette nuit. Il ne nous reste plus qu'à barrer en permanence. Heureusement que ce n'est pas arrivé à mi-course. Comme la vague est vraiment pénible, nous nous relayons toutes le heures au lieu des deux heures habituelles.

Magnifique dernière journée. Mais on se réjouit tellement d'arriver qu'on n'en profite pas vraiment. Pourtant un fort vent de 25 à 30 noeuds nous fait glisser au milieu d'énormes vagues écumantes en direction de Ste-Lucie. Dernier coucher du soleil, dernier ciel superbe et les lumières de la Martinique à tribord...plus que 20 milles, cela paraît dérisoire.

09.12.05 :

01h45 : nous passons la ligne d'arrivée dans un dernier grains . L'organisation est parfaite : même à cette heure-là un photographe professionnel attend en bateau moteur et vient nous flasher ! Dès l'amarrage dans la marina terminé, un comité d'accueil nous félicite et nous offre un panier de fruits frais, une bouteille de rhum et un verre de bienvenue !

Au réveil, nous n'apprécions même pas le pain frais ! Celui de notre boulanger était bien meilleur. Mais il y beaucoup d'autres choses que l'on est heureux de retrouver : le téléphone pour la famille, la végétation, la vie de la marina, les discussions avec les voisins qui permettent de revivre la traversée, qui soudain paraît très courte ! Et le plaisir intense de faire la vaisselle à plat ! Mais par-dessus tout, c'est le plaisir d'être à nouveau aux Antilles.

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