Accueil
Le bateau
Les capitaines
Les voyages

Pour voir un autre voyage, utilisez ce menu...

Italie - Tunisie

Le retour de Pierre, le 19 octobre, a correspondu à la fin des belles conditions de croisière. Le temps s'est brusquement rafraîchi, le ciel s'est voilé, la température de l'eau incite moins à la baignade. Conséquence immédiate : plus un bateau à l'horizon . Nous nous retrouvons seuls, en mer comme au mouillage, qui sont toujours aussi rouleurs d'ailleurs. Tout ceci nous pousse à faire route au sud.
Nous visitons tout de même la jolie ville d'Amalfi. Ce nom ne me disait pas grand chose et pourtant c'était l'une des 4 républiques autonomes de la botte italienne au VIIIème, aux côtés de Pise, Gênes et Venise. Les amalfitains étaient de grands navigateurs et de bons commerçants. Ils ont créé un code maritime qui a été longtemps en vigueur en Méditerranée, ils ont introduit l'utilisation de la boussole, ils ont importé des pays arabes la technique de la fabrication industrielle du papier et ils ont développé le commerce entre l'Europe, l'Afrique et le Moyen-Orient.
Petites rues médiévales, maisons agrippées aux rochers et... imposante... surprenante,,, dominant une petite place de ses 57 marches, la cathédrale St-Andrea Apôtre. Construite au Xème, elle a été agrandie, transformée, complétée au fil des siècles. Nous ne sommes pas assez amoureux des vieilles pierres pour l'apprécier à sa juste valeur (je n'ai pas hérité ça de mes parents!!) mais la façade, avec ses colonnes mauresques et ses mosaïques, est magnifique.
Dans les échoppes, on trouve les produits de la région : tomates, piments et champignons séchés, légumes, citrons, cédrats et le fameux Limoncello (qu'on a rebaptisé Simoncello depuis nos derniers visiteurs !).
Sur la route du sud, nous allons de volcan en volcan. Nous avions aperçu le Vésuve en quittant la baie de Naples, nous passons à côté du Stromboli en traversant sur la Sicile. Il rajoute tranquillement quelques volutes au ciel déjà bien chargé.
Nous mouillons ensuite au pied de Vulcano, qui fume lui aussi et nous envoie ses effluves de soufre. Nous restons trois jours sur cette île faisant partie du groupe des Eoliennes. Les ferries débarquent chaque jour des touristes qui partent à l'assaut du volcan. Nous y étions monté en 98 mais les genoux de Pierre n'y résisteraient pas cette fois-ci, malheureusement. Nous ne verrons pas l'Etna puisque notre route longe le nord de la Sicile.
Nous passons quelques jours à Cefalu, ville de pêcheurs aux ruelles étroites, aux balcons embaumant la lessive, si proches les uns des autres que les "mama" discutent en chemise de nuit, le matin, entre voisines, comme si elles étaient dans le même appartement. On passe discrètement en dessous, en s'excusant presque d'entrer ainsi chez elles !
Cefalu est dominée, elle aussi, par une superbe cathédrale au style roman et byzantin. C'est suite à un voeu fait lors d'une tempête en mer que Roger II, roi normand, a débuté en 1131 la construction de ce monument. Il semblait être tolérant puisqu'il a su apprécier et garder le style byzantin amené par ses prédécesseurs. Un imposant Christ en mosaïque décore la voûte de l'abside.
Nous assistons à la "Sagra del Pesce Azzuro", la fête du poisson bleu (sardines, maquereaux, anchois...). Les pêcheurs, et quelques restaurateurs, installent des stands de dégustation et la foule se précipite pour manger... à l'oeil. On attend une demi-heure au premier rang que la "pasta al capone" soit prête (délicieux ! le "capone", c'est le nom sicilien pour la dorade coryphène, le mahi-mahi antillais que l'on retrouve ici en modèle un peu réduit). Ensuite, impossible de déguster autre chose... on fait la queue... longtemps...mais sans avancer ! Vous avez déjà vu les italiens faire la queue ? Mais l'ambiance est chaleureuse et on se câle avec une "gelati".
Nous voulions aller à Palerme mais le vent est trop faible et on a décidé d'arrêter de griller du fuel pour rien. Alors on s'arrête à Termini Imerese, même si ce n'est pas l'endroit le plus sympathique. Un coup de scirocco nous bloque deux jours au port. Objectif de cette halte forcée : trouver une télé 12V qui entre dans un équipet de 51 x 47 cm ! Après une recherche infructueuse à Termini grâce au surveillant du port qui emmène spontanément Pierre dans son triporteur, nous louons une voiture pour continuer les investigations à Palerme. Pierre se rend vite compte qu'il lui faut oublier les règles de ciculation suisses pour arriver à avancer. Foncer, klaxonner, s'imposer... même le soir à 18h, en pleine ville... il assure. Et de grandes surfaces en commerces d'électronique, on finit par trouver notre bonheur. Pour les vieilles pierres de Palerme... on reviendra !
Le lendemain. nous profitons de la voiture pour aller dans l'arrière-pays. La région est couverte de cultures et d'oliviers. On se rend compte à quelle point le Sicile est agricole. Pierre découvre que la route que nous suivons était celle parcourue par un célèbre rallye automobile, qu'il suivait quand il était adolescent, la Targa Florio. Il en reste quelques vestiges.
De cap en cap, nous poursuivons la navigation le long de la côte nord de la Sicile pour terminer à Trapani. Une ville qui ne nous avait pas tentés, à tort, les autres années. Tournée vers la mer, vers l'Afrique, dont elle est séparée par les 150 km du canal de Sicile, c'est une ville commerçante et vivante.
Quelques belles places, une grande artère pavée, bordée d'anciens palais, des églises à tous les coins de rue, des pâtisseries redoutables (on a fait des provisions de petits fours aux amandes), des rues commerçantes où nous avons fait des kilomètres pour trouver, à pied cette fois, une prise 12 V pour la fameuse télé, et un port très vaste avec des cargos, des ferries (en quantité !), des pêcheurs, des chantiers navals, des voiliers et même des Optimists en régate ... Trapani méritait bien une visite. Il reste même des traces du passage des Class America en 2005 pour un Act de la Louis Vuitton.
On est impressionné par l'épave d'un magnifique bateau australien de 60 pieds qui s'est échoué deux semaines auparavant, lors de la Middle Sea Race, près de Trapani. Ayant perdu son safran dans un vent de 50 noeuds, l'équipage a été évacué par hélicoptère avant que le bateau ne termine sur les rochers. La Méditerranée ne fait vraiment pas de cadeau !
Après une semaine de temps instable et orageux, le vent du nord est annoncé et nous en profitons pour faire les dernières traversées du canal de Sicile avec arrêts à Favignana et à Pantelleria. Nous sentons l'écurie et avons hâte, après 11 mois de navigation, de nous poser un moment... de ne plus réfléchir à la météo et à notre sécurité. A Pantelleria, les chalutiers de Mazara del Vallo se mettent au quai, juste derrière nous, pour la nuit. Ils déchargent, sous de puissants spots, crevettes, calmars, petits poissons. Nous leur offrons quelques châtaignes grillées et ils nous donnent quelques merluches.
Pantelleria, c'est aussi, plus tristement, un petit cimetière de bateaux partis de Tunisie avec leur cargaison de candidats à l'immigration clandestine. Il y en a moins qu'à Lampedusa mais on imagine tous les espoirs mis dans ces embarcations, minuscules pour certaines, toutes les désillusions, tous les drames. Le livre "Eldorado" (de Laurent Gaudé - Actes Sud), traitant de ce sujet, m'avait secouée.
Nous devons prendre des risques pour nous échapper de Pantelleria. Nos cartes météo (grib), très précises mais aléatoires comme toute météo, nous annoncent une bonne semaine de vent du nord très fort. Une seule fenêtre le jeudi 8 novembre, en partant tôt. Mais la météo italienne annnonce par VHF un coup de vent sur la zone (qui est très grande !) On fait le pari, après mûre réflexion et décryptage des cartes, que ce coup de vent ne concerne pas notre route et on décide, en fin d'après-midi, de se mettre au mouillage dans l'avant-port pour partir facilement à 3 h du matin. Il faut dire que ce port est mal, signalisé, mal éclairé, plein de rochers, de bouées et que nous nous sommes attachés dans une vraie toile d'araignée pour résister au coup de vent en cours. Alors démêler tout cela au milieu de la nuit...?! Nous vivons quelques heures difficiles entre 17 et 21h, avant que le vent ne faiblisse enfin, comme prévu. Ouf ! Mais la vague levée entre directement dans le mouillage et nous secoue comme en pleine mer. A 2h, on n'y tient plus. On lève l'ancre, on hisse la grand-voile et on s'enfuit de cette île belle, mais mal équipée et mal située, en cette saison, au milieu de ce canal très venté. Nos voisins de ponton y sont certainement restés piégés une bonne semaine !
La traversée s'est révélée magnifique, à 7 noeuds de moyenne, avec un espadon en prime ! Et c'est avec bonheur que nous accostons à Monastir et que nous retrouvons notre amie Magali. Le même jour arrivent Alain et Françoise sur Burdigala, depuis la Sardaigne, et Alain sur Helena, depuis Lampedusa. A cette saison, toutes les routes mènent à Monastir ! Et c'est une autre vie qui commence...

Retour